Tournant dans les politiques migratoires du Maroc et de l’Algérie

Une étude récente de l’Institut for Security Studies met sur la table le changement d’orientation des politiques migratoires de ces deux pays du Maghreb. Jusqu’à il y a peu, il n’existait pas de politique migratoire au sens strict du terme puisqu’on considérait simplement qu’il s’agissait de pays de transit entre le centre et le sud de l’Afrique et l’Europe. Les immigrants étaient des individus en transit dont le nombre avait certes doublé ces dernières années (bien que les principales routes d’immigration illégale vers l’Europe passent par l’est et le centre du continent).

Dernièrement, l’Algérie, reprenant la politique entamée par le Maroc en 2013, a annoncé des plans pour concéder des droits de résidence aux immigrants subsahariens illégaux, sans pour autant révéler le nombre de régularisations qui seraient concédées (on calcule qu’il y a entre 25 000 et 100 000 immigrants irréguliers). Le Maroc avait déjà régularisé 25 000 immigrants en 2013 et prépare actuellement une deuxième campagne. Les avantages de ces campagnes peuvent être divers :

  • Les deux pays ont besoin de main d’œuvre dans différents secteurs. Les immigrants peuvent combler ce vide et contribuer à la croissance économique du pays.
  • Cela renforce la position des deux pays au moment de négocier avec les États membres de l’Union puisque l’un des objectifs de cette dernière est la contention des immigrants à l’origine (avant d’atteindre l’Europe). Les facilités pour régulariser leur situation dans les pays de transit pourraient les dissuader de poursuivre leur chemin migratoire. Si l’on considère, par exemple, qu’en février de cette année, 1 100 Subsahariens sont entrés en Espagne en trois jours, la perspective de contenir ces contingents au Maroc ou en Algérie semble attrayante.
  • Cette régularisation peut faciliter une certaine intégration des immigrants, ce qui tendrait à minimiser l’influence de certains groupes comme ISIL ou Al Qaeda, présents dans le secteur, sur ces individus, compte tenu que les « déracinés » sont toujours plus aisément séduits par leurs discours. Cela permettrait de combattre la menace terroriste avec plus de garantie de succès.
  • Ces régularisations renforceraient les relations des deux pays avec ceux de la région subsaharienne ainsi que leur suprématie dans le secteur.

Curieusement, ces régularisations suscitent certaines réticences de la part de groupes qui s’y opposent parce qu’ils considèrent que les immigrants irréguliers n’apporteront que des influences négatives. Par exemple, en Algérie, l’annonce de la régularisation a donné lieu à une campagne sur Internet, intitulée « Pas d’Africain en Algérie » et arguant que ces immigrants peuvent leur prendre des postes de travail et répandre le SIDA.

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