La polémique sur les centres d’internement des étrangers se poursuit

La controverse sur le bien-fondé des centres d’internement des étrangers (CIE) est revenu à la une de l’actualité en avril dernier lorsque le ministre de l’Intérieur, Juan Ignacio Zoido, a annoncé à la réunion plénière du Sénat l’ouverture de trois nouveaux centres à Madrid, Algesiras et Malaga.

Si la Mairie de Barcelone avait déjà demandé à plusieurs reprises la fermeture du CIE de Barcelone ces dernières années, c’est aujourd’hui l’Observatoire du système pénal face à l’immigration, l’Institut andalou de criminologie de Malaga et l’université de cette même ville qui publie aujourd’hui un rapport demandant la fermeture des huit centres d’internement existant en Espagne et l’abandon de l’ouverture de ceux annoncés par le ministre.[1]

Cette polémique ne fait que relancer un débat très animé au niveau de l’Union européenne : la gestion des flux migratoires (et de réfugiés) respectant les principes démocratiques des États membres et de l’Union même. Entre autres mécanismes prévus pour gérer les étrangers sans permis de séjour en attente du résultat de la procédure d’expulsion, on a créé des centres d’internement qui, sans être réellement des prisons, permettraient de confiner, sans liberté de mouvement, les individus en séjour irrégulier sur le territoire national d’un État membre, en attendant l’issue de la procédure administrative (ou pénale) décrétant l’expulsion ou, au contraire, l’autorisation de séjour dans le pays concerné.

L’Union européenne avait essayé d’implanter les mesures nécessaires pour contenir l’immigration moyennant la Directive relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres pour le retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier,[2] qui a donné lieu à une nouvelle réforme de la législation sur les étrangers en Espagne et, quelques années plus tard, à un règlement de fonctionnement des CIE.[3] Quoi qu’il en soit, ces réformes législatives n’ont pas bénéficié d’un large consensus, notamment dans les pays du sud de l’Europe, sujets à d’importants flux migratoires provenant d’Afrique et abandonnés à leur sort par leurs partenaires du nord de l’Europe. Les mauvaises conditions dans ces centres ainsi que la restriction des droits qu’ils impliquent (la directive permet jusqu’à 180 jours de privation de liberté ; jusqu’à 60 jours pour la loi espagnole), ont provoqué des manifestations réitérées dans le temps, tant d’associations de défense des droits de l’homme que de professionnels travaillant auprès des individus affectés et de certains groupes politiques.

Le rapport présenté à Malaga début juillet, exigeant la fermeture de tous les CIE, avance, entre autres critiques, qu’en 2016 seuls 29% des individus internés dans ces centres ont été expulsés. C’est-à-dire que 71% d’entre eux ont été remis en liberté, ce qui, aux yeux des signataires, revient à utiliser ces centres comme une deuxième prison, sans aucun motif justifié (souvent au seul grief de séjour irrégulier). Cette situation n’a fait que se dégrader de façon alarmante au fil du le temps puisqu’en 2013 déjà, 52,5% des individus internés finissaient par être expulsés ; en 2014, ce chiffre tombait à 47,5% puis à 41,4% en 2015, avec encore douze points de moins pour l’année dernière. Autrement dit, si le but des centres est de faciliter l’expulsion des étrangers, leur efficacité (compte tenu que le nombre d’individus internés n’a pas augmenté) est en train de chuter vertigineusement.

[1]Vid. https://ocspi.wordpress.com/2017/06/22/razones-para-el-cierre-de-los-cie/

[2] Vid. http://eur-lex.europa.eu/legal-content/ES/TXT/?uri=celex%3A32008L0115

[3] Vid. https://www.boe.es/buscar/doc.php?id=BOE-A-2014-2749

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